Focus sur les règles applicables en matière de retenue sur salaire

11 juin 2024 par
Vincent Jacquet

La rémunération constitue la contrepartie du travail effectué par le salarié au profit de son employeur. A ce titre, l’employeur doit en principe verser au salarié l’intégralité de sa rémunération à la fin de chaque mois. Dans certaines situations, l’employeur peut être amené à se faire rembourser certaines sommes qui sont dues par le salarié en retenant une partie de sa rémunération. Cependant, une telle retenue sur salaire ne pourra se faire que dans quatre cas qui sont limitativement énumérés par la loi. Rappel des règles …

Les cas autorisant une retenue sur salaire

En dehors de l’hypothèse d’une saisie sur salaire ou d’une cession de rémunération, l’employeur n’est autorisé à pratiquer une retenue sur salaire qu’en cas :

1. D’amendes encourues par le salarié en vertu du Code de travail ou de la loi, en vertu de son statut ou en vertu d’un règlement d’ordre intérieur régulièrement affiché dans l’entreprise.

2. De réparation du dommage causé par la faute du salarié (notion d’acte volontaire ou de négligence grave du salarié).

3. De fournitures au salarié :

a) d’outils ou d’instruments nécessaires au travail et de l’entretien de ceux-ci,

b) de matières ou de matériaux nécessaires au travail et dont les salariés ont la charge selon l’usage admis ou aux termes de leur engagement.

4. D’avances faites en argent.

Remarque Les acomptes versés pour un travail déjà effectué ou en cours, pour lequel un décompte définitif n’a pas encore été établi, ne sont pas considérés comme "avance faites en argent". Seules sont considérées comme avances faites en argent au sens du point 4 ci-dessus, la remise d'argent faite par l'employeur en dehors de l'exécution du contrat de travail.

En dehors de ces quatre cas de figure, l’employeur ne peut pas pratiquer de retenue sur salaire et doit garantir au salarié la pleine disponibilité de sa rémunération.

Le montant de la retenue sur salaire

Tout d’abord, il y a lieu de noter que ces 4 types de retenues ne se confondent ni avec la partie saisissable, ni avec la partie cessible de la rémunération. Elles sont donc calculées indépendamment des saisies ou cessions sur salaire éventuelles.

Les retenues qui sont effectuées dans le cadre d’une amende (point 1), de réparation du dommage causé par le salarié (point 2) ou encore d’avances faites en argent (point 4) ne peuvent pas dépasser 10 % de la rémunération mensuelle nette.

En cas de fournitures au salarié (point 3), l’employeur peut procéder directement à la retenue sur salaire pour le montant intégral des outils ou matériaux concernés.

Enfin, il faut tenir compte du fait qu’un salarié ne peut pas donner d'avance son accord quant à une retenue sur salaire. Même si le salarié et l’employeur établissent un document écrit permettant une compensation entre la rémunération du salarié et la créance de l’employeur, celui-ci ne sera valable qu’à la condition que la créance de l’employeur corresponde à l’un des 4 cas de figure énoncés par la loi.

Le cas du congé pris en trop par le salarié…

Si l’employeur a accordé à son salarié un congé payé d’une durée supérieure à la durée de congé auquel il avait droit, il est bien entendu en droit d’exiger de son salarié le remboursement du salaire perçu en trop. En effet, le salarié a une obligation légale de rembourser à l’employeur un montant perçu à tort.

Cependant, étant donné que le cas du « congé pris en trop par le salarié » ne fait pas partie des 4 cas de figure limitatifs prévu par le Code du travail, l’employeur ne peut pas procéder à une retenue sur le salaire pour récupérer sa créance. En conséquence, l’employeur doit en principe passer par une demande de remboursement, adressée au salarié, par rapport au montant en question. En cas de refus de remboursement du salarié, l’employeur peut agir en justice pour faire valoir ses droits.

Remarque : Si l’employeur effectuait malgré tout une retenue sur salaire dans un cas qui n’est pas prévu par la loi, le salarié pourrait agir en justice et réclamer le versement du montant illégalement retenu. L’employeur serait alors condamné à rembourser au salarié ledit montant. Néanmoins, dans le cadre de l'action en justice introduite par le salarié, l'employeur pourrait faire valoir sa revendication quant au remboursement du salaire qu’il a versé en trop et le salarié serait alors, en fin de compte, également condamné à rembourser à l'employeur le montant correspondant à l’indemnité de congé pris en trop.